Explication

Banque de France, opération « stress tests » climatiques

De nombreuses études d’ONG de défense de l’environnement pointent régulièrement l’exposition de certains établissements à travers leurs financements au secteur des énergies fossiles.
De nombreuses études d’ONG de défense de l’environnement pointent régulièrement l’exposition de certains établissements à travers leurs financements au secteur des énergies fossiles. ALEXIS SCIARD / IP3 PRESS/MAXPPP
L’institution monétaire devrait lancer prochainement un exercice inédit en France : évaluer la résistance des grandes banques et compagnies d’assurances au changement climatique et à la transition écologique qu’il implique sur leur modèle d’affaires. Plus compliqué à faire qu’à dire.

Le risque climatique est un sujet qui monte dans le petit monde de la supervision financière et la Banque de France a bien l’intention de jouer un rôle de premier plan en la matière.

Son gouverneur, François Villeroy de Galhau l’avait annoncé, à la fin de novembre, lors de la 5e édition du Climate Finance Day, à Paris : en 2020, toutes les grandes banques et les principales compagnies d’assurance françaises vont subir des « stress tests » pour évaluer leur résistance à l’impact que pourraient avoir le changement climatique et la transition écologique qu’il implique sur leur modèle d’affaires. Par exemple sur leurs investissements dans le secteur des énergies fossiles.

Une opération inédite en France

Promesse tenue : la Banque de France et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) qui lui est adossée, institution chargée de la supervision de la banque et de l’assurance, devraient faire connaître prochainement la méthodologie qui sera employée pour conduire cet exercice.

Une opération inédite en France car, jusqu’à présent, les seuls « stress tests » mis en œuvre par la Banque de France – comme les autres banques centrales – étaient pour s’assurer que les banques et les assurances étaient capables de faire face à une crise financière. Mais évaluer leur résilience à la crise climatique apparaît autrement plus compliqué.

« C’est en tout cas un véritable défi technique », commente un expert du dossier. Pour évaluer le risque climatique sur le bilan des banques et des assureurs, il faut d’abord parvenir à définir ce qu’est un actif « vert » ou « brun » selon son empreinte carbone, autrement dit son impact potentiel sur l’environnement.

Des résultats attendus à la fin de 2020

« Cela pose un problème évident de taxonomie, de classification des actifs pour distinguer ceux qui sont durables de ceux qui ne le sont pas, ou moins », poursuit l’expert.

Autre question à régler : sur quels scénarios s’appuyer pour mesurer, aujourd’hui, les dégâts potentiels que provoquerait un risque pour l’instant lointain ? Pionnière en la matière, la Nederlansche Bank, la banque centrale des Pays-Bas, a réalisé ses premiers tests climatiques à partir de quatre hypothèses : celle d’un choc réglementaire, celle d’un choc technologique, les deux chocs combinés, et un choc de confiance.

Les spécialistes de la Banque de France et de l’APCR mettent la dernière main à leurs propres modèles qui devraient fournir des résultats avant la fin de l’année. Mais ceux-ci seront publiés de manière « agrégée » et non pour chaque établissement. « Pour le premier exercice du genre, il ne faut pas attendre de conclusions normatives », prévient un responsable du dossier.

Un sujet qui fait polémique

Les banques et les assurances françaises sont-elles prêtes à affronter le risque climatique ? Le sujet fait polémique. De nombreuses études d’ONG de défense de l’environnement pointent régulièrement l’exposition de certains établissements à travers leurs financements au secteur des énergies fossiles.

En avril 2019, une note de l’APCR observait pour sa part « des progrès dans la prise en compte du risque climatique au niveau des groupes bancaires », tout en considérant qu’ils pouvaient mieux faire.

Les tests de résistance à venir devraient apporter un éclairage nouveau sur la question. Et peut-être servir de catalyseurs à une meilleure prise de conscience du problème par les acteurs concernés.

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