Le Vatican entre dans une nouvelle ère numérique. Si Benoît XVI a été le tout premier pape à tweeter en 2012 sous le pseudonyme @Pontifex, Léon XIV, élu ce jeudi 8 mai, est le premier à prendre la tête du Saint-Siège avec un long historique de publications sur les réseaux sociaux.
Contrairement à ses prédécesseurs, qui faisaient un usage mesuré des réseaux sociaux, le nouveau pape se distingue par ses 400 messages publiés sur X en quatorze ans. Originaire de Chicago et missionnaire au Pérou, ce religieux des augustins semble voir dans les réseaux sociaux un outil pastoral.
Son activité numérique, bien que sporadique par moments, donne à ses messages un poids particulier. S’il se contente souvent de reposter des contenus ou de renvoyer vers des sites Internet, son profil numérique semble montrer que, pour lui, republier équivaut presque toujours à une approbation. Il s’agit rarement de simples réflexions spirituelles : ce sont des prises de position nettes, généralement politiques.
Engagé sur la question migratoire
Illustré par une photo de lui avec le pape François, son compte @drprevost, silencieux pendant deux ans, est ainsi réactivé en février dernier. Il relaie alors un éditorial du National Catholic Reporter intitulé « J. D. Vance a tort : Jésus ne nous demande pas de hiérarchiser notre amour pour les autres ». Cela lui vaut des dizaines de milliers de « j’aime » et une avalanche de commentaires acerbes. Ce texte répond directement à une déclaration du vice-président américain, converti au catholicisme en 2019, qui s’était appuyé sur le précepte de l’ordo amoris pour justifier une politique anti-immigration.
Ce geste n’est pas isolé. Déjà, en 2015, il republie une tribune rédigée par Mgr Timothy Dolan intitulée « Pourquoi la rhétorique anti-immigrés de Donald Trump est si problématique ». Il partage plus tard une lettre écrite par le pape François, condamnant les expulsions massives de l’administration Trump, et republie en 2017 un article qualifiant la politique anti-immigration du président américain de « moment sombre de l’histoire des États-Unis » et d’abandon des « valeurs américaines ».
« La peine de mort est inadmissible »
Mais l’engagement numérique du pape ne s’arrête pas aux questions migratoires. Il prend également position sur la nécessité de transparence dans le traitement des abus sexuels dans l’Église, le racisme systémique aux États-Unis ou encore la peine de mort. En 2020, il soutient un appel à prier pour la famille de George Floyd, un Afro-Américain tué par la police.
En 2022, il déclare que « la peine de mort est inadmissible ». Une position alignée sur celle de l’Église, qu’il a répétée avec constance dans ses homélies et interviews. « Il faut être en faveur de la vie à tout instant », déclare-t-il par ailleurs en espagnol devant des journalistes, langue qu’il maîtrise parfaitement.
Certains de ses messages, notamment ceux visant J. D. Vance ou Donald Trump, ont suscité de vives réactions, y compris de figures de l’extrême droite comme Laura Loomer, qui l’a qualifié de « pape woke » et « marxiste ». Mais ces critiques ne semblent pas avoir affecté les relations diplomatiques de Léon XIV : le président des États-Unis et son vice-président ont adressé leurs félicitations au nouveau successeur de Pierre.
Le rythme de ses publications s’est intensifié durant la pandémie de Covid-19, comme pour beaucoup d’utilisateurs. De quoi nourrir la réflexion du cardinal Ladislav Nemet pour qui « à l’époque de Léon XIII, il y avait une révolution industrielle. Aujourd’hui, avec Léon XIV, nous vivons une révolution numérique ». Reste à voir si le nouveau pape poursuivra cette approche une fois qu’il sera pleinement investi de sa charge.