Élections en Pologne : quels seront les pouvoirs du nouveau président nationaliste ?

Le nationaliste Karol Nawrocki a été élu président de la Pologne à l’issue d’un second tour serré, dimanche 1er juin 2025. (Ici, le 29 mai 2025 lors d’un meeting à Katowice)
Le nationaliste Karol Nawrocki a été élu président de la Pologne à l’issue d’un second tour serré, dimanche 1er juin 2025. (Ici, le 29 mai 2025 lors d’un meeting à Katowice) BEATA ZAWRZEL / NurPhoto via AFP
D’une courte tête (50,89 % des voix), le nationaliste Karol Nawrocki a été élu président de la Pologne, d’après les résultats du second tour des élections publiés ce lundi 2 juin. Quels seront ses pouvoirs, alors que se profile une difficile cohabitation avec le premier ministre libéral Donald Tusk ?

À peine 400 000 voix les séparent mais la balance a finalement penché en faveur du candidat nationaliste. À l’issue d’un second tour particulièrement indécis face au maire de Varsovie, le pro-européen Rafal Trzaskowski, c’est le candidat soutenu par le PiS Karol Nawrocki qui a été élu président de la République de Pologne, selon les résultats publiés ce lundi 2 juin.

Cette courte victoire (50,89 %) est un revers majeur pour le gouvernement libéral mené par le premier ministre Donald Tusk depuis 2023. Celui-ci espérait une victoire du candidat pro-UE pour enfin pouvoir mettre en place des réformes jusqu’ici bloquées par le président nationaliste sortant, Andrzej Duda.

La cohabitation avec Karol Nawrocki, qui a déjà annoncé que sa principale mission serait de s’opposer au gouvernement Tusk, s’annonce au moins aussi compliquée. D’autant que le nouveau président a déjà dénoncé les aides accordées aux réfugiés ukrainiens et accusé Volodymyr Zelensky de faire preuve d’« insolence ». Au-delà des annonces, quelle influence peut avoir le président polonais sur la politique de son pays ?

Un très puissant droit de veto

Si le président du cinquième pays européen le plus peuplé peut être à l’origine d’une initiative législative, il possède surtout un droit de veto sur n’importe quel texte de loi. Contrairement au système français où le chef de l’État promulgue les lois, son homologue polonais peut arrêter tout projet de loi en utilisant ce droit de veto dans un délai de vingt et un jours après le vote d’un texte.

Ce veto peut être annulé lorsqu’il est levé par la majorité des trois cinquièmes de la Sejm (chambre des députés polonaise). Mais, dans le contexte actuel, les élus de la coalition au pouvoir ne seraient pas assez nombreux pour contourner ce veto présidentiel, pouvoir unique en Europe.

La Pologne pourrait se retrouver assez largement bloquée par ce pouvoir constitutionnel. Depuis 2023, le président Andrzej Duda, soutenu par le PiS, a d’ailleurs utilisé ce pouvoir pour bloquer 13 mesures portées par le gouvernement libéral. Elles concernaient notamment la restauration de l’indépendance des médias publics, l’élargissement des droits liés à l’avortement et la dépolitisation de la justice, entre autres.

Le président sortant transformait chaque usage de ce veto en coup de tonnerre médiatique. En décembre 2023, il a, par exemple, paralysé le pays en bloquant le budget Tusk qui incluait le financement des médias publics et l’augmentation des salaires des enseignants.

Dans la Constitution, un article 126 flou

L’article 126 de la Constitution polonaise confère au président le rôle de « gardien » de la continuité de l’État et du respect de cette même Constitution. Cette mission, particulièrement floue, a été régulièrement invoquée par Andrzej Duda lorsqu’il a été question de s’opposer aux mesures progressistes voulues par le gouvernement.

Le président sortant a souvent brandi cet argument, obligeant Donald Tusk à prouver qu’il agissait bien dans l’intérêt de la Pologne. Il a notamment répété qu’il ne prévoyait pas d’envoyer « des soldats polonais sur le territoire ukrainien », parce que l’armée polonaise doit servir à défendre son propre sol. Il a également été contraint d’infléchir sa politique migratoire pour prouver qu’il agit en faveur de la Pologne plus qu’au service de l’UE.

Un rôle dans la défense et la politique étrangère

Sur la scène internationale, le président polonais ratifie et révoque également les accords internationaux. Surtout, il est le porte-voix de la politique étrangère du pays et décide des ambassadeurs qu’il envoie dans chaque capitale. Or, en plus de ses annonces anti-immigration et anti-UE, le nouveau président a également multiplié les attaques envers l’Ukraine. Même s’il a assuré qu’il maintiendrait le soutien à son voisin, il n’a cessé de marteler que les prestations sociales étaient « avant tout destinées aux Polonais », et pas au million de réfugiés ukrainiens sur son sol.

Le président est également le commandant suprême des forces armées. C’est lui qui nomme le chef d’état-major général et les commandants de toutes les branches de services. Alors que la Pologne est le pays de l’Otan qui consacre le plus d’argent à sa défense (4,7 % de son PIB en 2025) et que le pays possède 200 000 soldats (première armée européenne, en nombre), ce nouveau statut de Karol Nawrocki devient particulièrement important.

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