Loi anti-tabac : 50 années de lutte contre la cigarette qui ont fait décrocher les Français

À partir du 1er juillet 2025, la cigarette sera interdite sur les plages, dans les parcs et aux abords des écoles, entre autres, a annoncé jeudi 29 mai la ministre de la santé, Catherine Vautrin.
À partir du 1er juillet 2025, la cigarette sera interdite sur les plages, dans les parcs et aux abords des écoles, entre autres, a annoncé jeudi 29 mai la ministre de la santé, Catherine Vautrin. Luc Nobout / IP3 PRESS/MAXPPP
Bientôt bannie des plages, des abords d’écoles et des parcs publics, comme l’a annoncé la ministre de la santé Catherine Vautrin, jeudi 29 mai, la cigarette est la cible d’une politique anti-tabac intense depuis cinq décennies en France. Retour sur plusieurs mesures marquantes vouées à faire décrocher les Français.

La ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, Catherine Vautrin, a annoncé jeudi 29 mai l’interdiction de la cigarette dans de nombreux lieux publics. « Là où il y a des enfants, le tabac doit disparaître », a résumé l’ancienne députée LR. Sont notamment concernés les parcs et jardins publics, les plages et les abords des écoles. Les terrasses de café, elles, passent entre les mailles du filet.

Cette nouvelle mesure s’inscrit dans une dynamique historique de lutte contre le tabagisme en France, mise en place dès la fin des années 1970. Alors que la cigarette se répandait abondamment dans toutes les strates de la société au sortir de la Seconde Guerre mondiale (la consommation de tabac double entre 1953 et 1980), le gouvernement français a progressivement intensifié sa lutte contre le tabac, à mesure que ses risques en matière de santé publique étaient révélés.

1976 : la première loi anti-tabac

En 1976, la ministre de la santé Simone Veil fait voter un premier texte relatif au contrôle du tabac. Depuis près de trente ans, tout le monde fume en France : de la femme aux enfants, en passant bien sûr par le mari, la consommation de tabac est largement étendue et le fumeur jouit d’une très belle image, à l’instar des stars du grand écran, qui ont toujours une cigarette au bout des doigts.

Il faut attendre les années 1960 et les premières mises en garde de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur les dangers du tabac, alors relié aux risques de cancer, pour qu’une lente prise de conscience s’opère. La loi Veil de 1976 impose l’inscription de la mention « Abus dangereux » sur les paquets et la publicité pour le tabac, alors présente au coin de chaque rue, est limitée à la presse écrite.

La cigarette est également bannie des établissements de santé et des écoles, alors que patients et élèves pouvaient, jusqu’alors vivre dans d’épais nuages de fumée. De leur côté, les vendeurs et fabricants de tabac n’ont plus le droit d’en distribuer gratuitement, ni de sponsoriser des événements sportifs.

1991 : la publicité est interdite

La loi Evin, du nom du ministre des affaires sociales et de la santé Claude Evin, durcit le ton sur le tabagisme et l’alcoolisme. Alors que la consommation de tabac ne diminue pas entre 1980 et 1991 (elle augmente même de 10 %), « il s’agit de légiférer sur des habitudes de vie qui conduisent à la mort ou à la souffrance physique et psychologique », détaille le ministre socialiste. Cette fois, la loi interdit toute sorte de publicité et impose la mention « Fumer nuit gravement à la santé » sur les paquets. Les prix du tabac sont également revus à la hausse.

En outre, elle prévoit l’interdiction de fumer dans les espaces à usage collectif. L’année suivante, un décret précise que « tous les lieux fermés et couverts accueillant du public ou qui constituent des lieux de travail » interdiront désormais la cigarette. C’est donc le cas dans les bureaux. Des emplacements réservés aux fumeurs sont maintenus et voient le jour dans les restaurants, les avions et les trains.

2003 : introduction d’un « Plan cancer »

Depuis la loi Evin, les courbes ont chuté. Pour la première fois depuis 1920, les Français fument moins. Mais Jacques Chirac, à son tour, intensifie la lutte. Lui-même fumeur, il met en place le premier « Plan cancer » : les prix augmentent, la vente est interdite aux moins de 16 ans, des campagnes de sensibilisation sont menées. Le 26 juillet 2005, une loi interdit les paquets de moins de 20 cigarettes et introduit la mention « Fumer tue ».

Au 1er février 2007, un décret impose l’interdiction totale de fumer dans tout lieu public. C’est la fin des zones fumeurs dans les cafés, discothèques et lycées.

Les années 2010 : une multiplication des mesures

Sous la présidence de Nicolas Sarkozy, un nouveau « Plan cancer » est envisagé. Pour lutter contre les pathologies liées au tabagisme, il prévoit de « soutenir la recherche », « lutter contre les inégalités » face à la maladie et améliorer « la coordination des soins ». Mais ses résultats sont peu concluants : la vente de cigarettes ne baisse pas, et le prix du tabac stagne.

En 2010, une nouvelle mesure chamboule cependant les emballages de cigarettes. Les avertissements sous forme d’images chocs deviennent obligatoires : poumons noircis ou mâchoires défigurées… En 2014, les paquets sont uniformisés, rendus « neutres » et la cigarette est bannie des espaces publics extérieurs qui disposent de jeux pour enfants.

2020 : le paquet de cigarettes franchit la barre des 10 €

Par la suite, les politiques de lutte ciblent particulièrement les prix pour dissuader les plus jeunes de commencer à fumer et inciter les fumeurs à arrêter. Ces augmentations graduelles poussent le paquet au-delà de la barre symbolique des 10 € en 2020.

Avec une certaine efficacité : entre 2017 et 2024, les ventes de tabac ont chuté de 7 %, selon l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives.

2025 : interdiction dans les parcs et aux abords des écoles

Le gouvernement annonçait en 2023 un Programme national de lutte contre le tabac, qui s’étendrait jusqu’en 2027. Dans le détail, il devait renforcer les contrôles sur les interdictions de vente aux mineurs, sur les achats hors circuit et généraliser des espaces sans tabac. Mais cette dernière mesure tardait, ce qui provoquait l’inquiétude des organisations de lutte contre le tabagisme.

C’est désormais chose faite. À partir du 1er juillet, la cigarette sera proscrite dans les espaces publics où évoluent des enfants, comme les jardins et parcs publics, les plages, mais aussi les abords des écoles, les abris de bus et les équipements sportifs. Cette mesure, déjà en vigueur dans 1 600 communes de l’Hexagone vise à « débanaliser » la cigarette.

OSZAR »