C’est une victoire pour les consommateurs et les assureurs, mais une lourde défaite pour les banquiers. Dans une décision rendue vendredi 12 janvier, le Conseil constitutionnel a confirmé que les emprunteurs peuvent résilier chaque année l’assurance liée à leur crédit immobilier, afin d’obtenir une offre moins chère.
Adoptée en 2017, dans le cadre de la loi Bourquin, cette possibilité donnée aux consommateurs était théoriquement en vigueur depuis le 1er janvier. Mais elle était en fait suspendue à l’avis des sages de la rue Cambon. La Fédération bancaire française (FBF) avait saisi le Conseil d’État afin d’annuler les dispositions clés de la loi et celui-ci s’en était remis au Conseil constitutionnel.
Les banquiers contestaient notamment l’aspect rétroactif de la loi Bourquin qui rend la renégociation annuelle possible pour tous les contrats, y compris ceux signés avant l’adoption du texte. Auparavant, avec la loi Hamon, les emprunteurs pouvaient changer d’assurance-emprunteur, mais uniquement dans les douze premiers mois de la signature du contrat.
Des économies pour les emprunteurs
Pour justifier son avis, le Conseil constitutionnel met en avant « l’intérêt général ». C’était argument développé par l’association de consommateurs UFC-Que choisir, expliquant que cela pouvait permettre « une diminution des primes d’assurances », et donnait « la possibilité aux malades de faire valoir leur droit à l’oubli ».
Aujourd’hui, l’assurance-emprunteur peut représenter jusqu’à 30 % du coût global d’un crédit, estime le courtier Inixia. Les banques, qui cherchent à gagner de nouveaux clients en pratiquant des taux de crédit très bas, ont en effet tendance à se récupérer un peu de marge sur l’assurance. « Des marges, a minima, excessives », estime même Pascal Demurger, le directeur général de la Maif.
Avec la disposition validée par le Conseil constitutionnel, l’économie pourrait ainsi être sensible. Selon les calculs du courtier Meilleurtaux.com, une assurance pour un prêt de 200 000 € sur 20 ans peut atteindre 0,42 % du coût d’un crédit, soit 70 € par mois et 16 800 € sur toute la durée. Mais, en faisant jouer la concurrence, la nouvelle assurance (qui devra offrir les mêmes garanties) peut être ramenée à 0,12 % soir 20 € par mois et 4 800 € sur les vingt ans. Soit au final, un gain de 12 000 € sur la durée du prêt.
La réaction des banques
Dans cette affaire, les banques risquent de perdre beaucoup. Après le boom des renégociations des taux de crédit, observé ces dernières années, elles vont sans doute devoir faire face une envolée des demandes de renégociations de l’assurance des prêts. « Cela va inévitablement déstabiliser le monde bancaire », note Sandrine Allonier, directrice des relations banques du courtier vousfinancer.
Pour compenser le manque à gagner, les banques pourraient être tentées de remonter leurs taux d’intérêt. À moins que la concurrence qu’elles se livrent, ne les poussent à rogner un peu plus sur leurs marges.