Aux Etats-Unis, la Fed prolonge le statu quo sur ses taux devant "tellement d'incertitudes"

Le patron de la Fed Jerome Powell s'exprime lors d'une conférence de presse, le 7 mai à Washington
Le patron de la Fed Jerome Powell s'exprime lors d'une conférence de presse, le 7 mai à Washington Brendan SMIALOWSKI / AFP

La Réserve fédérale américaine (Fed) a décidé à l’unanimité de laisser ses taux inchangés mercredi, se disant dans l’incapacité de prévoir où va l’économie américaine confrontée à l’onde de choc des nouveaux droits de douane de Donald Trump.

Il y a « tellement d’incertitudes » autour des répercussions de ces nouvelles taxes sur les importations que la Fed préfère ne pas bouger ses taux pour l’instant, a déclaré son président Jerome Powell en conférence de presse.

Depuis la dernière réunion de la banque centrale, en mars, le locataire de la Maison Blanche a déclenché un séisme économique.

Lors de ce qu’il a lui même surnommé « jour de la libération », le 2 avril, il a érigé un mur de nouvelles taxes sur les produits importés aux États-Unis.

Donald Trump a depuis partiellement fait marche arrière et promis des « deals » avec les partenaires majeurs des Etats-Unis pour alléger la facture. Aucun n’a encore été annoncé.

Les droits de douane restent beaucoup plus élevés qu’avant le début de son second mandat, et les échanges avec la Chine sont quasiment à l’arrêt.

Des responsables américains et chinois ont rendez-vous pendant le week-end en Suisse pour poser les bases d’une négociation.

Le statu quo sur les taux d’intérêt (dans une fourchette comprise entre 4,25% et 4,50% depuis décembre) était largement anticipé par les marchés.

La croissance américaine de 2015 à 2025
La croissance américaine de 2015 à 2025 Elsa RANCEL, Paz PIZARRO, Jonathan WALTER / AFP

La Bourse de New York n’a pas dévié de sa trajectoire à l’issue de cette décision, et a terminé la séance en hausse.

« Défi »

« Que cela plaise ou non, le leitmotiv du président de la Fed a toujours été de prendre des décisions réfléchies à partir de données économiques incontestables », relève dans une note Charlie Ripley, chargé de stratégies d’investissements chez Allianz Investment Management.

« La patience est une vertu et la Fed en a apparemment beaucoup en réserve », ajoute-t-il, s’attendant à ce que la Fed s’abstienne de baisser ses taux jusqu’à ce qu’elle engrange assez d’éléments attestant d’un ralentissement de l’économie.

Les baromètres réguliers - sur le moral des consommateurs notamment - montrent une nervosité croissante, de même que les communications des entreprises.

Toutefois, les indicateurs de référence n’ont pas déraillé: 4,2% de chômage en avril, 2,3% d’inflation sur un an en mars, légèrement au-dessus de la cible de la Fed.

« Ces données officielles témoignent d’une situation passée. Et toutes les informations qui remontent par ailleurs sont plutôt mauvaises », souligne auprès de l’AFP l’ancien économiste de la Fed Rodney Ramcharan.

« La Fed n’a pas beaucoup de bonnes options devant elle », ajoute celui qui enseigne désormais la finance dans une école de commerce californienne. « C’est vraiment un choix compliqué. »

Jerome Powell a admis que la Fed pourrait se retrouver face à un « défi » si le chômage augmente en même temps que les prix.

Pour juguler l’inflation, une banque centrale augmente généralement ses taux directeurs, qui guident le coût du crédit pour les entreprises et particuliers.

En revanche, si des emplois sont détruits, elle est censée les baisser pour donner un coup de fouet à l’activité économique.

Le président de la Fed Jerome Powell, à Chicago, le 16 avril 2025
Le président de la Fed Jerome Powell, à Chicago, le 16 avril 2025 KAMIL KRZACZYNSKI / AFP

En plus de ce contexte ultra changeant, la Fed - et surtout son président - font face à des critiques répétées de Donald Trump, qui veut voir les taux baisser, ce qui aurait le mérite d’amortir quelque peu l’impact des droits de douane, au risque de nourrir l’inflation.

Les déclarations présidentielles « n’affectent pas du tout notre travail », a assuré M. Powell.

« Nous considérons, a-t-il poursuivi, toujours uniquement les données économiques, les perspectives, la balance des risques et c’est tout. Donc cela n’affecte vraiment pas ni notre travail, ni la manière dont nous l’exécutons. »

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