RD-Congo : qu’est-ce que le M23, ce groupe armé qui mène une offensive éclair sur Goma ?

Des membres du groupe armé M23 patrouillent à la frontière entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, près de la ville de Goma dans l’est de la RDC, mercredi 29 janvier 2025.
Des membres du groupe armé M23 patrouillent à la frontière entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, près de la ville de Goma dans l’est de la RDC, mercredi 29 janvier 2025. Brian Inganga / AP
Aidé par l’armée rwandaise, le groupe armé M23 occupe mercredi 29 janvier 2025 la quasi-totalité de Goma, grande ville de l’est de la République démocratique du Congo. Depuis la reprise des hostilités avec les forces congolaises en novembre 2021, le « Mouvement du 23 mars » sème le chaos dans le nord-est du pays.

Goma, principale ville de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), s’apprête à tomber ce mercredi 29 janvier aux mains du groupe armé M23, opposé au régime de Kinshasa et soutenu par l’armée rwandaise, un nouveau séisme dans une région stratégique meurtrie par trente années de violences entre groupes armés.

Les combattants du M23 et ses alliés rwandais ont assiégé la capitale de la province du Nord-Kivu au terme d’une offensive éclair de quelques semaines, avant d’y pénétrer dimanche soir. Kinshasa accuse Kigali de vouloir piller les nombreuses richesses naturelles de la région, alors que le Rwanda, qui dément, dénonce la présence côté congolais de groupes hostiles.

L’histoire du mouvement rebelle M23 est intimement liée aux relations conflictuelles entre ces deux pays d’Afrique, englués depuis plus de trente ans dans le contrecoup du génocide des Tutsis au Rwanda de 1994.

L’accord du 23 mars 2009

Le M23, abréviation du « Mouvement du 23 mars », est né en 2012 d’une mutinerie d’anciens rebelles tutsis du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), un mouvement de rébellion armé pro-rwandais actif dans l’est de la RDC entre 2006 et 2009. Ce dernier avait pour objectif la défense de la communauté tutsie dans la région, ainsi que la neutralisation des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé créé par des Hutus réfugiés au Congo après la fin du génocide au Rwanda, et considéré comme une menace par le régime de Paul Kagame à Kigali.

Le 23 mars 2009, le CNDP conclut un accord de paix avec le régime de Kinshasa, d’où le M23 tire son nom. Ce traité prévoit notamment la libération des prisonniers, la transformation du CNDP en parti politique, et l’insertion de ses combattants tutsis dans les forces armées congolaises.

Toutefois, les rebelles prennent à nouveau les armes en avril 2012, estimant que Kinshasa n’a pas respecté les termes de l’accord. Ils déclarent le mois suivant la formation du Mouvement du 23 mars.

Le mouvement est considéré par de nombreux observateurs comme la « créature » du Rwanda, dont il bénéficie du soutien actif, malgré les dénégations officielles de Kigali.

Aussitôt créé, le M23 lance une offensive dans l’est de la RDC, occupe plusieurs villes de la province du Nord-Kivu, dont le chef-lieu Goma durant quelques jours, avant d’être vaincu par les forces armées congolaises et les casques bleus déployés sur place dans le cadre de la mission de l’ONU pour la stabilisation en RDC. Un nouvel accord de paix est signé en décembre 2013, sans réellement parvenir à mettre fin aux hostilités entre le M23 et les forces armées congolaises.

Résurgence en 2021

La milice, tout comme l’armée congolaise, est par ailleurs accusée de nombreuses exactions contre les populations locales. Les enquêteurs de l’ONU ont constaté dès 2013 de graves violations des droits de l’homme avant, pendant, et après la chute de Goma aux mains du M23. L’ONG Human Rights Watch accuse également les rebelles et les soldats de l’armée congolaise d’avoir commis des meurtres et des viols durant la rébellion du M23 entre 2012 et 2013.

Le M23 réapparaît fin 2021 et prend à nouveau le contrôle de vastes pans de territoire dans la province du Nord-Kivu. Cette résurgence provoque une nouvelle crise entre le Rwanda et la RDC : un rapport d’experts de l’ONU de juillet dernier établit que 3 000 à 4 000 soldats rwandais combattent au côté du M23 et que le Rwanda a « de facto » pris le « contrôle et la direction des opérations du M23 ».

Les combats se poursuivent dans la région malgré l’appel de la communauté internationale à cesser les hostilités. Les violences aggravent également une crise humanitaire chronique dans la région : selon l’ONU, un demi-million de personnes ont été déplacées par les affrontements depuis début janvier. L’ONU et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) s’inquiètent de nombreuses conséquences dévastatrices des combats, telles que les viols, pillages, pénuries alimentaires, et du risque de dissémination du virus Ebola, du choléra ou de la rougeole.

OSZAR »